La question relative au report des élections générales est sur toutes les lèvres des congolais et congolaises qui ne savent pas à quoi rassemblera le 20 décembre 2023. Un jour ordinaire comme tous les autres ? La question vaut en tout cas son pesant d’or.
Dans des salons politiques, on en juge même l’opportunité à une semaine de la date fatidique. Le peuple congolais est appelé à se présenter devant les différents bureaux et centres de vote pour élire ses nouveaux représentants à tous les niveaux. Mais, cet exercice par lequel le souverain primaire lègue son pouvoir aux meilleurs d’entre-nous n’est pas sans danger en République démocratique du Congo.
«Les élections de 2023 risquent d’être les pires de l’histoire si elles sont organisées selon l’ordre actuel des choses», font remarquer la plupart des observateurs indépendants.
La CENI, gros nœud du problème
Les événements intempestifs sont innombrables et, si l’on peut dire, leurs effets le sont davantage, puisque le même événement peut avoir de graves effets sur tout le long du processus électoral. En plus des agissements du pouvoir, voulant conserver le pouvoir le plus longtemps possible par des voies peu conventionnelles et démocratiques, c’est-à-dire sans élégance ni fair-play politique, le gros nœud du problème aura été l’équipe dirigeante de la CENI dont la mise en place est un sujet à caution.
Cela va de plain-pied : amateurisme, incompétence, partisanerie, tâtonnement telles sont les principales accusations de l’Opposition contre l’équipe Kadima. Jour après jour depuis son entérinement, la CENI et le pouvoir se sont, sans la moindre décence, montrés très proches l’un de l’autre, convolant en justes noces et hypothéquant l’espoir d’un processus électoral fiable , transparent, inclusif et pacifique.
Peut-on affirmer que l’opposition avait raison de s’en inquiéter depuis longtemps ? A 8 jours de la tenue des élections générales , le déploiement des kits électoraux sur les sites de vote n’est pas effectif. Mis à part ce problème logistique qui serait réglé grâce à l’Angola qui est venu à la rescousse de la RDC, M. Kadima a urgemment besoin de plus de 170 millions USD pour parachever les opérations électorales. Ce n’est pas tout : les électeurs dont les cartes sont défectueuses font des pieds et des mains pour avoir les duplicata. Là aussi, ça se passe toujours de manière inattendue, estime l’opposition qui accuse les hommes du chef de profiter de cette situation pour faire un nouvel environnement en leur faveur. Une accusation de plus qui n’ira pas loin, car balayée d’un revers de la main par l’équipe de la CENI, tout de même suffisante pour créer davantage la méfiance au sein de la population.
Le report, une solution ?
Curieux que cela puisse paraître, nombreux sont ceux [ esprits critiques] qui sont favorables au report de ces élections même au sein de l’Union Sacrée. Pour beaucoup d’ailleurs, cette période au cours de laquelle chaque candidat a l’obligation de mieux se vendre et séduire les congolais ressemble plus à un renouvellement de soutien, à une réitération de leur loyauté au chef de l’État qu’à une campagne électorale digne de ce nom.
Dans ces conditions, il serait défendable que les leaders politiques se mettent autour d’une table pour décider autrement de la nouvelle direction que devrait prendre le pays. C’est là que le report peut intervenir pour permettre aux uns et aux autres de dissiper toute ambiguïté, donner la chance au pays d’aller à ce jeu démocratique sans encombre et surtout en évitant le piège du chaos planifié par certains individus.
Il faudrait reconnaître que le report, considéré comme une solution, rien qu’à s’en tenir aux faits et gestes de nombreux candidats, ferait plus d’heureux que de malheureux puisque le pays aura échappé de justesse à une grande tentation. Cependant, l’on n’entend pas les choses de cette oreille dans les rangs du candidat Moïse Katumbi prêt à en découdre avec Félix Tshisekedi le 20 décembre prochain, date des scrutins combinés. Ce faisant, l’ancien gouverneur de l’ex- province du Katanga et richissime homme d’affaires congolais a réussi à créer une fédération de forces et d’alliances autour de lui pour faire la différence face au candidat n°20, candidat du pouvoir. Plein de cartouches, Moïse Katumbi porte un chiffre de visitation mais aussi de résurrection [n°3] du Congo dont il promet la réalisation partout il est passé jusqu’ici pour battre campagne. Si MK n’entend pas reculer d’une seule semelle, les autres candidats à cette course pour la magistrature suprême sont prêts à applaudir de leurs mains en cas d’annulation par la Cour constitutionnelle de ces scrutins pour un probable partage du gâteau. Tout un rituel en Rd Congo… C’est désormais un secret de polichinelle. Denis Mukwege, Théodore Ngoy et Martin Fayulu joueraient bien leur carte… les trois mousquetaires ont saisi la haute Cour de justice en contestation des irrégularités qui émaillent ce processus électoral.
On en droit de se poser quelques questions au finish. Que veut vraiment Martin Fayulu, farouche opposant au régime Kabila. En feignant de battre campagne, le proprio de Faden House s’est associé au tandem Théodore-Mukwege pour accuser la CENI. Est-il convaincu de sa marche ? Le fait-il pour quel objectif ? Pourquoi a-t-il changé d’avis en postulant comme candidat président s’il n’avait pas confiance en ce processus électoral comme il l’a fait remarquer depuis le début ? N’est-ce pas un cas d’inconstance, de manque d’objectivité et de vision ? A chacun d’en tirer conclusion.
Ça crève les yeux que les animateurs de la CENI ne sont pas dignes de foi et ne rassurent même pas à 70% toutes les parties prenantes au processus électoral. D’ores et déjà, les joutes électorales de décembre suscitent divers sentiments chez les uns et chez les autres. Le consensus étant loin d’être trouvé, il est nécessaire voire crucial que chacun de nous se batte pour sauver ce qui peut l’être, voilà le moins que l’on puisse dire à ce stade.
Rappelons que la campagne électorale est désormais entrée dans une nouvelle phase avec une opposition croisante entre les deux principaux candidats, le président sortant Félix Tshisekedi et son challenger Moïse Katumbi. Une campagne qui va durer jusqu’au 18 décembre prochain.
Par Gédéon ATIBU