Dans le cadre de l’actuel processus électoral en République Démocratique du Congo, qui est présentement à sa première étape : celle d’identification et d’enrôlement des électeurs, en vue des élections de décembre 2023, notre équipe rédactionnelle a réalisé une interview exclusive avec Maître Horteli Umba, avocate au barreau de Kinshasa-Matete, sur la loi du 24 décembre 2004, portant identification et enrôlement des électeurs.
Cet article vous présente ladite interview dans son intégralité, avec toutes les questions posées par la Rédaction de la Radio de la Femme et toutes les réponses données par Maître Horteli Umba, pour vous permettre de bien comprendre l’actuelle loi portant identification et enrôlement des électeurs en République Démocratique du Congo.
L’entretien entre l’équipe rédactionnelle de la Radio de la Femme et Maître Horteli Umba se présente comme suit :
Radio de la Femme : Comment peut-on définir juridiquement l’enrôlement en République Démocratique du Congo?
Me Horteli Umba : La concept enrôlement est défini à l’article 2 de la loi portant identification et enrôlement des électeurs, comme l’inscription des éléments d’identification des électeurs sur la liste des votants appelée liste électorale.
Radio de la Femme : Quel est l’instrument juridique qui cadre le sujet de l’enrôlement en RDC dans l’arsenal juridique congolais?
Me Horteli Umba : L’instrument juridique qui cadre le sujet de l’enrôlement dans l’arsenal juridique congolais est la loi du 24 décembre 2004 portant identification et enrôlement des électeurs en RDC.
Radio de la Femme : Un citoyen peut-il refuser de s’enrôler ? Que devient-il par rapport à la loi lorsqu’il refuse de se faire enrôler?
Me Horteli Umba : La réponse c’est « non », car un citoyen ne peut pas refuser de s’enrôler. L’inscription sur la liste des électeurs est un devoir civique comme le stipule l’article 4 de la loi précédente. De ce fait, tout congolais en âge de voter, c’est à dire tout congolais ayant atteint l’âge de 18 ans révolu, a l’obligation de se soumettre personnellement à l’identification et l’enrôlement, car nul ne peut s’y soustraire.
Radio de la Femme : Est-ce que la carte d’électeur est une preuve de nationalité congolaise?
Me Horteli Umba : Non, la carte d’électeur n’est pas une preuve de nationalité congolaise, le seul document servant de preuve de nationalité est la carte d’identité et cette dernière est délivrée par la Commission Nationale d’identification de la Population, qui malheureusement n’est pas encore effective, elle le sera au cours de l’année 2023, mais en attendant la carte d’électeur fait office de pièce d’identité, mais elle n’est pas une preuve de nationalité congolaise.
Radio de la Femme : Quelles sont selon vous les opportunités que présente la carte d’électeur ?
Me Horteli Umba : La carte d’électeur a un double avantage, elle sert premièrement à son titulaire de prouver son identité (donc, c’est une pièce d’identité). Et deuxièmement c’est un document légal qui sert à son titulaire de voter.
Radio de la Femme : Quelles sont les limites de la carte d’électeur ?
Me Horteli Umba : Quant aux limites de la carte d’électeur, nous avons premièrement les limites territoriales (c’est à dire que la carte d’électeur de la RDC n’est valide que sur le territoire congolais, en dehors du territoire congolais elle n’est pas valide), deuxièmement, elle est limitée à l’échéance électorale en cours, donc, elle n’est pas perpétuelle (c’est à dire que pour les prochaines élections, il faudra une nouvelle identification, un nouvel enrôlement, on devra délivrer d’autres cartes d’électeurs, donc, l’actuelle carte d’électeur n’est valide que pour cette année électorale).
Radio de la Femme : Que devient juridiquement un citoyen qui a perdu sa carte d’électeur ?
Me Horteli Umba : L’article 27 prévoit qu’en cas de perte de carte d’électeur, d’abord au cours de la période d’identification et d’enrôlement, le titulaire doit s’adresser à son centre d’identification pour demander un duplicata, mais si la perte est constatée après, la demande ne sera faite qu’au bureau de liaison et un duplicata lui sera délivré à cette occasion.
Radio de la Femme : Y a-t-il des personnes non éligibles à l’enrôlement légalement parlant? Si oui, qui sont ces personnes là ?
Me Horteli Umba : L’article 9 reprend toutes les personnes qui ne peuvent pas être enrôlées. Il s’agit premièrement des personnes frappées d’une incapacité mentale totale médicalement prouvée (exemple : un fou ne peut pas voter). Deuxièmement, les personnes privées par décision judiciaire définitive de leurs droits civils et politiques, et troisièmement des militaires et policiers en fonction.
Radio de la Femme : Qu’arrive-t-il à la personne qui se fait enrôler deux ou plusieurs fois ?
Me Horteli Umba : La réponse à cette question est prévue dans l’article 45 qui renseigne que sera punie pour faux en écriture conformément au code pénal congolais, toute personne qui se fait inscrire volontairement plus d’une fois. La deuxième sanction est qu’elle sera rayée de la liste électorale, donc elle ne va plus figurer parmi les électeurs.
Radio de la Femme : Que peut-il arriver à un étranger qui se fait frauduleusement enrôler et prend la carte d’électeur ?
Me Horteli Umba : Pour un étranger qui se fait frauduleusement enrôler, ce sont les mêmes sanctions qui seront appliquées, c’est à dire il sera premièrement rayé de la liste électorale, et sera aussi puni de servitude pénale de 6 mois à 5 ans conformément à l’article 124 du code pénal congolais.
Radio de la Femme : Qu’arrive-t-il à la personne qui aurait fait un faux témoignage en faveur d’un étranger ou d’une personne non éligible, en vue de l’aider à obtenir la carte d’électeur ?
Me Horteli Umba : La question est prévue dans l’article 48 de la loi, renseignant que toute personne qui à l’occasion de l’opération d’identification et d’enrôlement aura fait un faux témoignage ou livré un faux document, dans le but conférer la qualité d’électeur à un tiers, sera punie de servitude pénale prévue à l’article 128 du code pénal, qui prévoit une peine s’élevant à 5 ans de servitude pénale.
Il sied de noter que cette interview réalisée avec Maître Horteli Umba, avocate au barreau de Kinshasa-Matete, sur la loi portant identification et enrôlement des électeurs en RDC, s’inscrit dans le cadre de sensibilisation à l’opération d’identification et d’enrôlement des électeurs en cours, lancée depuis le 24 décembre 2022, dans la première zone opérationnelle comprenant 10 provinces de la RDC : Kinshasa, Kongo Central, Kwilu, Kwango, Mai-Ndombe, Mongala, Équateur, Tshuapa, Nord-Ubangi et Sud-Ubangi. Signalons que cette première phase d’enrôlement des électeurs qui va durer un mois, prendra fin le 25 janvier 2023.
Patrick Mangoma/Radio de la Femme